Noël 2021 : De l’Enfant-Dieu à l’Homme-dieu

1 février 2022 | Par Jean-Marc Lemay | Philosophie, vol. 20, no 1

En ce Noël 2021, j’ai fait un retour dans l’inconscient collectif. Dans mon enfance, le jour de Noël était sacré, à peu près comme tous les jours de la semaine quand on regardait les saints qui habitaient chaque jour le Calendrier du Sacré-Cœur.  

La messe de Noël était le lieu privilégié de rassemblement des fidèles. On y déguisait des jeunes en anges, d’autres en bergers qui apportaient, en procession, l’Enfant Jésus dans sa crèche. À cette époque tout était sacré et en latin lors des messes. Kyrie éleison, Gloria in excelsis Deo, De profundis clamavi, Ite missa est… On n’y comprenait rien, mais c’était beau! Même le savantissime prêtre commençait toujours son sermon par une phrase en latin pour épater le peuple croyant.  

La vie quotidienne était réglée sur le divin : faire ses Pâques, participer à la procession de la fête Dieu, le mois de Marie, le chapelet à la radio tous les soirs, la messe du dimanche, porter le deuil en noir pendant un an, la visite paroissiale du curé qui vérifiait si des couples empêchaient la famille, l’étude de la vie des saints et des saintes qui arrivaient à vivre une espèce d’orgasme spirituel qui les amenait en lévitation! Etc, etc. Le curé était le maître du cheminement spirituel de ses fidèles, entretenant la culture de son pouvoir et de son savoir. Par la confession, il savait tout de la conduite de ses fidèles. D’ailleurs, en 1957, A Chanson publia un livre de 500 pages qui leur était destiné: « Pour mieux confesser » dans lequel il énumère tous les péchés possibles sur lesquels devraient porter les questions du confesseur. C’est ahurissant, mais c’était l’époque! 

Puis, les plus âgés parmi nous, se rappelleront la chanson de Renée Claude :  

« C'est le début d'un temps nouveau
La terre est à l'année zéro
La moitié des gens n'ont pas 30 ans
Les femmes font l'amour librement
Les hommes ne travaillent presque plus
Le bonheur est la seule vertu. » 

Et c’est en 1961 qu’on passa de l’Enfant-Dieu à l’Homme-dieu, lors du premier envol spatial de Gagarine qui permettait de sortir de l’attraction terrestre et d’ouvrir les esprits à plus grand que soi après l’envoi précédent de la chienne Laïka. L’homme-dieu prenait alors conscience de son pouvoir terrestre passant du peuple à genoux à peuple debout. Et, est-ce un adon que, ce 25 décembre 2021, des scientifiques lancent le plus puissant télescope à plus d’un million de kilomètres dans l’espace. Celui-ci y découvrira-t-il les limbes où demeurent tous les enfants mort-nés, y rencontrera-t-il le purgatoire où se nichent tous les croyants en marche vers la perfection? Réussira-t-il enfin à percer le mystère du ciel où réside l’âme de tous les croyants qui ont atteint la perfection? Quant à l’enfer, arriveront-ils à découvrir, au fin fond des volcans, l’âme de tous les condamnés éternels aux feux de la géhenne?  

Mieux encore, l’homme-dieu réussira-t-il surtout à répondre à cette question : Il est où le bonheur éternel? Finalement, ne résiderait-il pas d’abord en soi-même? 

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