Inaction du gouvernement Legault : S’organiser collectivement pour mieux faire face à la crise du logement
L’heure est grave pour les locataires. Le milieu communautaire sonne l’alarme depuis trop longtemps. La coordonnatrice de la Table d’action contre l’appauvrissement de l’Estrie (TACAE), Rosalie Dupont, dénonce que « face à la crise du logement, le gouvernement du Québec dilapide les fonds publics dans des projets menés par le marché privé, alors que nous savons que c’est justement la mainmise du marché privé sur notre parc de logements qui nous a plongés dans cette situation. Par ce choix totalement idéologique, le gouvernement se désengage encore une fois et abandonne ses citoyennes et citoyens dans une crise qui fait de plus en plus de victimes. »
Face à ce constat, le milieu communautaire estrien, accompagné de ses allié.es et avec l’aide de ses regroupements nationaux, a organisé une journée de formation et de réflexion sur l’enjeu du logement, un droit inaliénable reconnu entre autres par la Déclaration universelle des droits de la personne. La Journée estrienne et communautaire sur le logement s’est tenue au Centre communautaire Saint-Benoît et a rassemblé plusieurs dizaines d’organismes communautaires, des travailleuses et travailleurs du réseau de la santé et des municipalités ainsi que des élu.es. L’événement leur a permis de partager leurs connaissances, d’affiner leur discours et de se mobiliser afin de véritablement endiguer la crise du logement.
Cet évènement s’est déroulé à Granby, car c’est l’une des villes estriennes ayant le plus écopé de la crise au courant de la dernière année. Pour reprendre les mots de Karine Lussier du Groupe Actions Solutions Pauvreté (GASP), « Granby est la ville avec le plus gros manque de logements abordables et sociaux et le plus haut taux d’augmentation des coûts des logements disponibles en seulement une année (54 %). Les 1 500 logements annoncés dans le dernier budget caquiste ne parviendront malheureusement pas à combler les besoins croissants des personnes à faibles et à moyens revenus. Avec un besoin minimal de 1000 logements seulement à Granby et une liste d’attente d’environ 400 personnes à l’OMH, l’avenir nous semble bien sombre. Se loger doit être un droit acquis et non une perpétuelle bataille à mener ! »
De son côté, le porte-parole de l’Association des locataires de Sherbrooke (ALS), Mario Mercier, souligne que « La crise du logement est hors de contrôle. Pendant que les villes et le gouvernement du Québec y voient des chiffres, nous y voyons des drames humains. Pour faire face au drame humain toujours plus difficile, nous avons besoin d’une commission québécoise d’enquête publique sur le logement. »
Cédric Dussault, du Regroupement des comité logement et association de locataires du Québec (RCLALQ), souligne que « la crise du logement n’est pas une fatalité, elle n’est pas circonstancielle, c’est une crise qui était et qui est encore évitable, c’est une crise qui est d’abord politique, parce qu’elle est le résultat des actions ou de l’inaction des pouvoirs en place. La crise du logement est d’abord une crise politique; la résistance à la crise du logement passe donc aussi par l’action politique, nationale, provinciale et locale. Le RCLALQ est donc à Sherbrooke pour parler de défense des droits des locataires et de mobilisation sociale et politique. »
Le FRAPRU, pour sa part, est extrêmement inquiet de la vitesse à laquelle la situation du logement se dégrade en Estrie et craint pour les locataires les plus vulnérables, notamment ceux et celles à faibles revenus dont les femmes sont souvent au 1er rang. Le regroupement de défense du droit au logement appelle à une large opposition au choix d’abandonner en douce le logement social et de ne financer aucune nouvelle unité dans AccèsLogis, le seul programme qui lui était exclusivement dédié. « Il n’y a pas 10 000 solutions pour sortir de la crise, il faut augmenter le nombre de logements sociaux et pour ça, ça prend rapidement un programme gouvernemental structurant, adéquatement financé. Les milliers de ménages locataires au Québec mal-logés, qui vivent dans un logement qui accapare 50 %, voire 80 % de leur revenu, et qui subissent continuellement les conséquences de la spéculation n’ont pas le luxe d’attendre, pas plus que les personnes qui tombent en situation d’itinérance dans l’indifférence complète », martèle la porte-parole du FRAPRU, Véronique Laflamme.
Vu l’urgence de la situation, le FRAPRU demande au ministre des Finances de bonifier rapidement ses investissements en logement social. « Ça ne peut pas attendre au prochain budget », insiste Véronique Laflamme. Elle croit que Québec devra absolument revoir ses positions et relancer le programme AccèsLogis, en l’absence d’un autre programme aussi structurant, alors que le 1er juillet s’annonce encore une fois très difficile et que les comités logement sont déjà submergés d’appels de ménages locataires inquiets : « On ne peut plus laisser la situation se détériorer. »
En terminant, la porte-parole du Collectif pour un Québec sans pauvreté, Virginie Larivière, rappelle que le désengagement du gouvernement est loin de toucher uniquement la question du logement : « L’inaction du gouvernement pour mieux soutenir les personnes en situation de pauvreté est affligeante. Les baisses d’impôt annoncées dans le dernier budget avantagent les ménages les plus nantis alors même que les banques alimentaires peinent à répondre à la demande, que les ententes de paiement chez Hydro-Québec sont en forte augmentation et que la crise du logement frappe partout au Québec. Le gouvernement a choisi d’ignorer les centaines de milliers de personnes qui n’arrivent pas à satisfaire leurs besoins de base! C’est insensé! »
Rosalie Dupont, coordonnatrice de la TACAE