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La conscientisation de l’Autre par la toponymie

1 octobre 2019 | Par Loïc Brurat | Culture

Mon ami pionnier et moi-même sommes devant le Café Croquis, sur la Wellington Nord, pour une entrevue avec deux auteurs sur la question de la parité homme ̸ femmes en toponymie. Le hic: exceptionnellement pour aujourd’hui, c’est fermé… et le temps nous est compté.  Prenons note que le lancement du livre Femmes et toponymie: De l’occultation à la parité (Éditions du Fleurdelysé) s’est déroulé à Sherbrooke, au café de quartier Baobab, le 3 septembre 2019, avec la conférencière invitée, l’historienne sherbrookoise Mme Micheline Dumont.. 

femmes et toponymieMon ami trouve Sarah Beaudoin et Gabriel Martin devant le café juste à côté. Heureusement que les cafés ne manquent pas sur cette rue! En s’installant au 2e étage du lieu de fortune, Sarah nous confie qu’elle dispose seulement d’une heure, afin de respecter un autre engagement. «Tout a commencé par une blague », me dit-elle; il y a neuf mois, dans ce même café, les deux universitaires se rencontrent pour parler de tout et de rien, lorsque Gabriel propose, à la blague, de créer ensemble un ouvrage proposant des pistes de solution pour une plus grande représentativité féminine dans nos noms de rues et lieux publics. 

 « Le fond du problème se situe dans les manières d’archiver les toponymes », me confie Gabriel, par exemple : avec le retrait des doublons. À une certaine époque, l’épouse perdait son nom de jeune fille pour adopter celui de son mari. Encore aujourd’hui, peu de municipalités retiendront le toponyme de celles ayant contribué à la société sous le nom de leur mari. La documentation existe, et l’Histoire ne s’en cache pas…       

 Lors de la concrétisation de ce projet de livre autofinancé, Sarah et Martin apprennent à faire équipe. Il existe un fossé entre le vécu des femmes et les théorisations que nous lui attribuons. Cette première leçon permet d’établir dans ce livre un dialogue se voulant constructif avec un lectorat n’ayant pas forcément le militantisme des co-auteurs. Sarah Beaudoin et Gabriel Martin sont des étudiants (psychologie et linguistique) qui appellent les citoyens à se conscientiser sur la quasi absence de place attribuée au statut des femmes à cause de biais toponymiques persistants. Le nécessaire changement de paradigme en matière de toponymie ne peut se réaliser sans volonté politique. 

Et la Commission de Toponymie du Québec? 

Dans le communiqué de presse du 8 mars 2018, de la Commission de Toponymie du Québec : «En 2017, parmi les 396 noms de lieux officialisés rappelant le souvenir d’une personne, 78 célébraient celui d’une femme ». C’est une augmentation de 7% depuis 2016... Où donc les femmes peuvent-elles se faire reconnaître, se faire honorer, lorsque pour dix toponymes de rues,de places ou d’immeubles publics choisis, un ou deux seulement pourraient porter le nom d’une personnalité féminine au Québec?  

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