Tes mots

4 octobre 2021 | Par Sarah Badkoube | Poésie, vol. 19, no 5

Tes mots de façades tristes

De pas de maison de pas de raison

D’être dehors encore

Après 8 heures le soir avant 5 heures le jour

 

J’ai compté, tu m'as dit

T’as compté, oui, sur tes doigts gercés de mains

Gelées, ça en fait neuf, neuf heures à errer

Tapi planqué suivi traqué

 

Ça met du piment, tu m'as dit

C’est un cache-cache géant, c’est la plus grosse

Partie de ta vie à chaque nuit

Ça met du piquant dans l'attente du matin qui se prépare

 

Tes mots de petits pas pressés sur le trottoir, de

Croissant chaud, de café frais, d’odeur de

Bouffe, de pisse de chien

Ça fait dur l'hiver su'a route, t'as dit

 

T’as dit en riant, t'as ri en pointant, t’as pointé en

Me regardant de ton sourire moins de dents

Tes mots qui n'attestent de rien avant l’aube et l’aurore

Tes mots de crépuscule insomniaque, tes mots d'avant soleil

 

Tes mots pas d'autorisation

Tes mots d'amende salée, de procès-verbal

Tes mots de contravention

Tes mots de refuge fermé

 

Ça fait un paquet de minutes qui se traînent, neuf heures

Des minutes solitaires de meutes cassées

Ça fait un paquet de moutons qui ne sautent dans aucun pré

Ça fait un paquet de pensées qui tournent et de rêves échoués

Ça fait un paquet de hamsters fatigués

 

Tes mots froids comme un corps mort de cadavre oublié

Ça fait dur l’hiver

Mais tes mots de temps rudes en toutes saisons,

Je veux les voir du toit de ton pas de maison

Je veux les voir dans toutes les rues du centre-ville

Tes mots de façade et de vitrine

Tes mots qui brillent

 

Tes mots miracles sur les murales trompe-l’oeil que je connais par coeur

Tes mots sauve-l'âme pour oublier que tu meurs seul

Dans mon pas de mots je veux les voir et que tu vives encore

Partagez
[TheChamp-Sharing]