Le mal-logement comme une gastro

1 avril 2022 | Par Luc Pelletier | Itinérance, Société, vol. 20, no 2

Vous habitez dans une yourte, sans eau courante, une toilette sèche, avec deux enfants.  Sur un lot de terre qui n’est pas le vôtre.  Vous avez une voiture et un vélo, un petit poêle à bois. 

Vous résidez chez votre sœur depuis 18 mois.  Elle a un mari compréhensif et trois enfants.  Vous partagez l’épicerie. Sans voiture. Le grand 5 et demi commence à être à l’étroit.  Les enfants ne sont pas plus turbulents que les vôtres l’étaient mais la concentration est difficile dans vos moments de recherche d’emploi. 

Depuis un mois, vous campez dans le pick-up King cab abandonné du beau-frère garé en arrière du bâtiment de ferme.  Vous arrivez à dormir, les banquettes étaient de qualité dans les années 1980.  Vous avez réussi à vous faire discret.  La famille de votre sœur est occupée par le train, la récolte du foin et de la paille.  Début novembre, les premières nuits fraiches vous font lever plus tôt. Vous marchez chaque matin jusqu’au restaurant-dépanneur du village à 10 km de là, pour un café chaud. 

Considérez-vous ces trois situations comme de l’itinérance ?  Sont-ce des logements adéquats et dignes ?  Le droit au logement adéquat a été mis en lumière (2018) par la rapporteure canadienne Leilani Farha pour l’ONU (Organisation des nations unies).  L’un des objectifs du rapport est d’inciter les nations à réfléchir à la question de l’habitation en termes de plan d’actions.  L’itinérance et le mal-logement sont à la fois indice que le marché de l’immobilier et les politiques publiques ne sont pas 100% efficaces et que les droits humains sont bafoués.   

En d’autres mots, laisser une personne à la rue ou dans un logement inadéquat est une menace à la vie et une attaque à la dignité humaine.  Sous votre toit, vous sentez-vous en sécurité, dans un logement abordable, habitable (eau potable, air propre), services à proximité (épicerie pas un dépanneur, pharmacie), accessible (ascenseur), lieu vivable (rue ou quartier collé à un chemin de fer, un boulevard ou un lac), en lien avec votre culture ?  Si oui, vous n’êtes pas dans une situation d’itinérance ou à risque d’itinérance. 

L’amoncellement de capital dans les mains de quelques humains permet d’investir dans une marchandise : l’habitation.  Et le logement abordable n’est pas tendance, il ne fait pas la première page des magazines.  Marchandise ou Droit (au logement), la pandémie nous l’aura pointé du doigt, le logement est un déterminant important de la santé physique et mentale, comme une soudaine gastro nous rappelle comment on est bien sans elle.  

Ne pas déménager ? 

Pour ceux et celles qui le peuvent, identifier la raison du déménagement si ce n’est pas déjà fait. Il y a peut-être des solutions... 

Cette année, avant de déménager
- Avez-vous pensé à prendre le temps de mieux connaître ou mieux comprendre ton voisin, ton coloc, ton conjoint pour tenter la médiation ?
equijustice.ca
- Avez-vous essayer de faire un budget, de prendre une entente de paiement, de t’informer de tes droits ?
acefestrie.ca
- Avant de signer un bail, une entente, un contrat, as-tu bien fait tes devoirs ?
consommersansillusion.ca 

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