Le cœur de la violence conjugale
La pandémie a mis en lumière la violence conjugale. Non seulement les personnes étaient obligées de se confiner, mais en plus, elles devaient parfois le faire avec des gens qui leur faisaient du mal. Aujourd’hui, la population est de plus en plus sensibilisée à cette situation et les statistiques le reflètent bien. Cependant, on a encore du mal à comprendre ce qui incite les victimes à rester avec leur agresseur et comment elles peuvent s’en sortir.
Selon le site du gouvernement du Canada, la violence conjugale comporte plusieurs aspects. Au cours du présent article, on traitera plus précisément de la violence psychologique, englobant les menaces de représailles, l’humiliation, la privation de contact et l’isolation. On la définit comme étant de la violence émotive et verbale, de la cruauté mentale, du terrorisme intime et de l’agression psychologique.
La reprogrammation du cerveau et du corps
Les victimes de violence ont subi un traumatisme qui restera imprégné dans leur subconscient, dans leur corps et dans leur cerveau. Selon l’ouvrage Le corps n’oublie rien (…), il existe plusieurs moyens de réparer un traumatisme. Le cerveau sécrète des substances qui font réagir la victime; il s’agit d’un mécanisme de défense permettant de la protéger. Afin d’enclencher ce processus, diverses avenues s’offrent à elle, dont la prise de médicaments, la pratique du yoga ou d’autres moyens de détente ou encore la thérapie ou la recherche de soutien quelconque.
La thérapie, comme la répétition d’affirmation positive, lui permettra de reprogrammer son cerveau, de refaire ses habitudes. Par conséquent, elle retrouvera confiance en elle, puis ses anciennes habitudes et l’éducation reçue n’impacteront plus son avenir. Le soutien de son entourage lui permettra d’aller chercher l’affection et l’amour dont elle a besoin pour se sentir en sécurité à nouveau. Cela pourra être réalisé de concert avec des proches ou avec une association spécialisée dans l’aide aux victimes de violence.
L’enfer d’un monde et ses métaphores
« Souviens-toi », disent les interprètes. Il faut se souvenir de ce qu’on a ressenti et ne pas oublier ce qu’on a subi pour éviter de retourner dans une relation toxique. Ces mots viennent de L’enfer d’un monde, un spectacle ayant eu lieu cet été.
ZemmourBallet, une compagnie de danse nouvellement installée à Sherbrooke, a bien cerné l’importance de ce sujet en décidant de réaliser ce spectacle sur les violences que les humains s’infligent entre eux. Nicolas Zemmour, directeur général de la troupe, chorégraphe et directeur artistique de cette œuvre, a fait énormément de recherche sur le terrain pour rendre son œuvre beaucoup plus réaliste. Il en a ressorti quatre métaphores.
La première est de rendre l’œuvre accessible en employant un langage commun, compréhensible à tous. L’utilisation du dictionnaire permet à M. Zemmour d’inspirer ses chorégraphies en décortiquant certains mots et de révéler que l’humain est complexe, qu’il a des plis, des nœuds qu’il faut apprendre à défaire et à découvrir.

La deuxième métaphore est celle du capitalisme, dans l’optique où la société a influencé l’idée qu’on peut contrôler une personne. Par exemple, avec le massacre des femmes mayas ou bien avec la mentalité patriarcale. Lors du reportage de M. Zemmour, une victime a confié que son agresseur l’avait persuadée qu’elle était folle. Ainsi, elle croyait perdre la tête. Selon la définition du dictionnaire, Cap (pour capitalisme) signifie tête. Par ricochet, prendre le contrôle de la tête. Une grande partie de l’œuvre de l’auteur s’en est inspirée.
S’ajoute à cela cette perspective d’intérieur et d’extérieur, comme une maison avec une fenêtre qui s’ouvre et se referme. On retrouve le principe que chaque individu doit s’ouvrir au monde, mais que parfois, on se retrouve dans une mauvaise situation qui nous donne envie de nous protéger, de nous fermer aux gens autour de nous.
Enfin, il y a cette idée d’obscurité et de la lumière de la vérité. L’obscurité étant confortable, la victime ne veut plus sortir, car elle ne saurait pas où se diriger à l’extérieur. La lumière est l’agresseur, car il n’y en a plus à l’intérieur d’elle.
Une approche tout en douceur
Le travail de Nicolas Zemmour est absolument incroyable, car il a su apporter une douceur dans un univers terrifiant. Même si la mise en scène rappelle parfois un film d’horreur, elle est empreinte d’une touche d’espoir, avec la vision que les victimes se relèvent et retrouvent leur lumière. Ainsi, le metteur en scène a réussi à trouver un équilibre : on se sent à la fois mal à l’aise dans certains passages, entre autres par la proximité des interprètes rappelant un amour malsain, puis à la fois consolés, dans les séquences de danse remplies de précision et de beauté. Cela prouve que l’art, soit la danse dans ce cas-ci, a permis de parler d’un sujet délicat, de sensibiliser les gens en douceur.
Bref, cette performance et cette recherche approfondie ont mis en lumière la difficulté de sortir d’une relation toxique. La peur de l’inconnu, la peur de tout perdre, le contrôle absolu qu’exerce l’agresseur et l’amour qui est là malgré tout seraient quelques raisons qui poussent une victime à rester avec une personne qui lui fait du mal. Cela démontre qu’il est primordial d’aborder les choses en douceur, de respecter les autres dans leurs choix, mais aussi de leur faire savoir qu’à l’extérieur, il y a des gens qui les aiment et qui seront là pour eux.