Vieillir en étant LGBTQ+ : des défis supplémentaires
Force est de constater que lorsque l'on parle de diversité sexuelle et de genre, ce sont généralement les jeunes ou les populations urbaines que nous mettons de l'avant. On estime pourtant que les personnes lesbiennes, gaies, bisexuelles, trans, et toute autre personne de la diversité sexuelle et de genre (LGBTQ+) représentent au moins 10 % de la population générale, et ce indépendamment bien sûr de leur génération ou de leur lieu de résidence. Mais pourquoi alors une telle invisibilité des personnes aînées LGBTQ+?
Pour comprendre ce phénomène, il est nécessaire de prendre en compte leur parcours de vie et leurs réalités actuelles. Tout d'abord, les personnes aînées LGBTQ+ ont connu une société tellement hostile à la diversité sexuelle et de genre, qu'elles n'ont souvent pas eu d'autre choix que de cacher leur orientation sexuelle ou leur identité de genre.
Stigmatisation juridique
Jusqu'en 1969, le Code criminel canadien condamnait les personnes ayant des relations homosexuelles de plusieurs années d'emprisonnement. On pouvait aussi discriminer une personne sur la base de son orientation sexuelle jusqu'en 1977 au Québec et jusqu'en 1996 au Canada. En ce qui a trait aux personnes trans (c'est-à-dire celles qui ne s'identifient pas au sexe qui leur a été assigné à la naissance), elles pouvaient être légalement discriminées jusqu'en 2016 au Québec et 2017 au Canada.
Stigmatisation médicale
L'Organisation mondiale de la Santé (OMS) a retiré l'homosexualité de la liste des maladies mentales le 17 mai 1990. C'est d'ailleurs en référence à cette date que la Journée internationale contre l'homophobie et la transphobie est célébrée tous les 17 mai. Quant aux personnes trans, ce n'est qu'en 2019 que l'OMS retire la transidentité de sa liste des troubles psychiatriques.
Stigmatisation sociale et religieuse
Révéler le fait que d'être LGBTQ+ exposait les personnes à un rejet virulent de la part de la société, de l'Église, mais aussi de la part de leurs familles, collègues et ami.e.s. En plus de ce rejet, il fallait également composer avec les clichés, les stéréotypes, ainsi que les violences verbales et physiques dont les personnes LGBTQ+ peuvent toujours faire l'objet aujourd'hui.
Bien sûr, le contexte en 2023 est beaucoup plus favorable, mais ces progrès demeurent récents et peu ancrés dans les mœurs et la culture. Plus une personne est âgée, plus elle a évolué dans un contexte hostile et plus grandes sont les chances qu'elle divulgue tard, ou jamais, son orientation sexuelle ou son identité de genre.
L'homophobie et la transphobie combinées à l'âgisme
Au-delà de l'homophobie et de la transphobie, il faut aussi prendre en compte l'âgisme qui constitue un obstacle supplémentaire. La population aînée étant elle aussi réduite à des stéréotypes qui laissent peu de place à la diversité et à l'individualité. Par ailleurs, on continue à tort de réduire les enjeux des personnes LGBTQ+ à une simple question de sexualité. Or, la sexualité des aîné.e.s constitue un tabou qui renforce l'effacement de la diversité sexuelle et de genre.
Une invisibilité forcée qui porte de lourdes conséquences
En effet, plusieurs études confirment que les personnes aînées LGBTQ+ sont plus à risque de subir de l'isolement, de la maltraitance et des problèmes de santé mentale. La réticence à dire le fait d'être LGBTQ+ ou de devoir le cacher constitue aussi un obstacle pour accéder aux services sociaux et de santé ou aux opportunités de socialisation. Imaginez évoluer dans des milieux dans lesquels vous ne vous sentez pas en sécurité de mentionner votre genre ou celui de votre partenaire!
Pour faire face à cette situation, la Fondation Émergence, un organisme de défense des droits des minorités sexuelles et de genre, a créé en 2009 le programme Pour que vieillir soit gai. Ce programme offre des formations et des outils de sensibilisation pour permettre aux milieux et services offerts aux personnes aînées d'être plus inclusifs.
L'importance du rôle des milieux et services pour personnes aînées
Ce sont eux qui peuvent briser le tabou, mettre en place des politiques d'inclusion, sensibiliser le personnel et les personnes qui utilisent leurs services. L'invisibilité quasi totale de la diversité sexuelle et de genre est souvent renforcée par les milieux aînés eux-mêmes qui tendent à maintenir un tabou autour de cette question. Faute de démonstration et d'efforts d'ouverture, les personnes LGBTQ+ sont nombreuses à ne pas se sentir à l'aise d'être elles-mêmes, ce qui les pousse à demeurer ou à retourner dans « le placard », avec les conséquences que cela implique sur leur bien-être.
N'attendez plus pour agir dans vos milieux, contactez la Fondation Émergence pour devenir de meilleur.e.s allié.e.s envers les personnes LGBTQ+ et créer des environnements plus accueillants à leur égard. Pour en connaître davantage à propos de nos services, visitez fondationemergence.org ou téléphonez-nous au 438 384-1058.
Julien Rougerie, Fondation Émergence