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Interculturalisme

Ma famille en 3 générations

1 février 2018 | Par Jan-L. Munk | Interculturalisme

En 1951, Jan Swennen reçoit une lettre d’un compatriote belge établi à Stanbridge Station, un certain Bellefroid. Leurs voisins, les Corriveau qui ne sont plus en mesure de s’occuper de leur ferme, sont prêts à la vendre. C’est l’occasion pour mes grands-parents d’immigrer au Canada avec une partie de leurs douze enfants dont ma propre mère. 

Jan-Léopold Munk photo de famille
La famille Munk (à gauche : Jan-Léopold).

Après la traversée de l’Atlantique en une dizaine de jours, la famille n’a pas eu le temps de se sentir immigrante ou pas, le travail les attendait. Certes, les Bellefroid les avaient accueillis, mais il fallait se débrouiller. Et comme si les tâches ne suffisaient pas sur leur ferme, il y avait aussi la récolte dans les vergers de la région, et j’en passe. 

Les souvenirs que ma mère nous a partagés sont empreints de joie et d’entrain. Je revisite les images de ma jeunesse, et ce qui me revient le plus c’est son attitude face à la vie, une sorte de prise en charge de son propre bonheur; et ce, malgré l’adversité. Je ne l’ai jamais vue s’apitoyer sur son sort. Encore aujourd’hui, lorsqu’elle entend quelqu’un chialer sur la société québécoise, les gouvernements et les hôpitaux, et la ville, et... - ça n’vous arrive jamais? -  elle revient toujours à la charge en rappelant ce qu’on a de positif chez nous. Oh! cela ne la rend pas moins militante, même à son âge, sagesse oblige. 

Pour mes frères, ma sœur et moi-même, nés de parents immigrants (mon père était un réfugié d’avant la guerre), on n’a pas eu à penser comme eux, malgré le fait que dans mon village natal, nous étions identifiables, différents des Canadiens-français de souche, des descendants des Loyalistes ou de ceux qu’on appelait les Indiens. Tantôt traités de boches, tantôt de sales juifs (mais rien de plus nocif, cela n’arrivait qu’à de rares occasions), nous avons tous appris à faire face aux défis de la vie chacun à notre façon. 

Tout cela pour dire qu’il y a bien des variables qui peuvent nous influencer lorsque vient le temps de construire les représentations qu’on se fait, tant de l’immigrant que de la société d’accueil. Il y a des gens qui se sentent étrangers dans leur propre pays, dans leur propre ville, dans leur propre famille, dans leur propre corps. Les questions à nous poser pourraient être : qu’est-ce que je peux faire pour me sentir mieux chez moi? Et qu’est-ce qu’on peut faire pour m’aider à mieux me sentir chez eux? 

Et en rapport avec l’autre, ben! Qu’est-ce que je peux faire pour l’aider selon les moyens à ma disposition? Et quelle est la part de responsabilité de l’autre? Il y a l’aide qu’on peut chercher, mais il y a aussi la prise en charge qui revient à chaque personne. 

Ce qui me fascine le plus c’est de voir ce que mes cousins et cousines sont devenus. Des membres de la société qui participent activement, sans voir le moi versus les autres. Ils ont choisi de s’intégrer tout en demeurant fidèles à eux-mêmes. 

Et la génération de leurs enfants, celle de mes propres filles? Je les vois aussi Québécois ou Canadiens (quelques-uns s’étant établis dans d’autres provinces au pays) que les gens qui les entourent tout en étant aussi fiers de leurs origines familiales que le sont nos compatriotes pure-laine. 

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