La barbe d’Omar Benlaala
C’est simple, chaque fois que je lis un roman initiatique, je l’associe à ma propre vie, histoire que je commence à peine à en reconnaître toute sa valeur. Sauf qu’avec La barbe, c’est comme si toute la psychologie humaine est spirituellement mise en valeur. Qui ne se cherche pas? Mieux ou pire encore, qu’est-ce qui fait qu’on ait à se chercher?
Nous avons ce jeune Français, issue d’un patrimoine maghrébin, qui, malgré tous les regards et les jugements environnants, aspire à un bien-être comme tout le monde. Euh… je dis bien comme tout le monde, sauf que les idéaux ne se présentent jamais de la même façon à chaque individu.
Dans son cas, il lui faudra passer par une visite à la mosquée de son quartier, puis par un voyage en Inde. Non pas du côté brahmanique, mais du côté de l’Islam. Disons que cela me rappelait les quêtes des hippies durant les années ‘70.
Le personnage s’impose une métamorphose par l’apprentissage de l’arabe classique, l’étude des textes sacrés, les rituels, les conventions sociales, la mode (les vêtements et la barbe). C’est sans trop de désillusionnements qu’il passe d’un extrême à un autre : celui des soirées discos, de la drogue, de la drague, à une religiosité qu’on accepte mal même dans les sociétés soi-disant ouvertes.
En nous faisant rencontrer ses propres parents et en faisant preuve d’une transparence toute objective, l’auteur humanise son parcours autobiographique, comme pour témoigner auprès d’un lectorat inconnu : celui d’une société laïque. Son écriture apprivoiserait autant le lectorat le plus froid aux cultures autres que la sienne, que celui issu de son propre milieu, tant l’auteur a une approche inclusive.
Dans une société où le nouvel arrivant (et que dire de leurs enfants?) se sent pris comme étranger, il cherche toujours « le meilleur moyen de cicatriser » (p.40), et cela ne se fera qu’avec l’amour. Cet amour peut se vivre sous l’expérience d’une amitié, d’une forme d’acceptation par autrui, d’un amour comme on l’entend (fou ou pas), mais aussi d’un coup foudre, d’une admiration un tant soit peu raisonnable pour un leader quelconque. Dans son cas, barbe ou pas, ce sera grâce à la rencontre d’un chef religieux bienveillant que l’auteur reprendra tranquillement sa vie en main, qu’il arrivera à rassurer ses parents pourtant laïcisés, qu’il se trouvera une place dans une société encore hostile à la différence.
Comme quoi, il y a toujours espoir, tant pour les personnes candidates en quête de bonheur que pour la société qui l’accueille, qui elle aussi se cherche une définition de bonheur. Ceci étant dit, ce livre m’a permis de comprendre ce que ma famille et mes proches ont vécu lorsque j’ai quitté le nid familial. Ce récit me rappelle la responsabilité sociale de l’accueil de l’autre, et l’idée de faire présence authentique à l’égard des personnes qui se cherchent.