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Enfant fragile, de l’anorexie à l’obésité morbide

1 décembre 2019 | Par Suzanne Drouin | Voix libre

 Enfance et adolescence 

Je suis née dans la Beauce, cadette d’une famille de trois enfants. J’ai deux frères. Mon père était comptable et ma mère la reine du foyer. J’ai toujours été une enfant un peu fragile, retirée dans son monde. Dès les premières années, j’étais une enfant mince. 

 Au secondaire, mon poids a atteint 83 lbs, sans jamais les dépasser,  pour une grandeur de 5 pi 3 po, jusqu’à mes 19 ans. Le calcul de mon IMC était de 14,7. Un IMC situé de 0 à 16.49 est une « maigreur extrême » (plus grand risque de mortalité que l'obésité classe 1 et 2). 

suzanne drouin
Suzanne à son 12e anniversaire de naissance.

Vie de famille 

Je vivais un sentiment d’impuissance et de détresse psychologique permanent dans ma famille. J’avais du mal à avaler quelques bouchées et je sautais des repas. À la maison, lors des repas, sitôt qu’il y avait une « discussion » orageuse entre mon père et mon frère, je me retirais de la table après avoir donné mon assiette, en cachette, à mon chien. Ou encore je disais à ma mère que je n’avais pas faim tout en filant vers ma chambre pour me réfugier. Moins je mangeais, moins j’étais capable de manger.  

 

Suzanne Drouin
Suzanne à 15 ans, en compagnie de sa fidèle amie Lady. Rien ne laissait présager la dépression qui s’installait et les idées suicidaires récurrentes.

J’ai vécu également du harcèlement sexuel à partir de l’âge de 12 ans, beaucoup de regards pervers. Je ne savais trop que faire. J’essayais de m’affirmer et d’arrêter l’homme en question, mais j’étais trop jeune et sous son autorité. Tout ce que je tentais échouait. 

 Le soir, je me réfugiais dans les films western. Je mangeais essentiellement des chips, du chocolat et je buvais du pepsi.  

 Une chance que j’avais un petit chien prénommée Lady. Elle me comprenait et sentait les choses. Immanquablement, Lady venait me retrouver. Et le soir, je m’endormais en la cachant sous les draps. C’était mon réconfort, ma sécurité. 

 

Mon médecin de famille 

J’ai consulté un médecin de famille qui ne m’a pas été d’un grand secours. Il a diagnostiqué de l’anxiété chez une jeune fille issue d’une famille dysfonctionnelle. Il me prescrivait du librium (librax), un anxiolytique, au besoin. J’ingurgitais bouteille après bouteille de Diovol pour calmer l’acidité de l’estomac et les ballonnements sans résultat.  

 À 19 ans, le médecin de famille a demandé une consultation au CHUL de Québec à un gastro-entérologue pour savoir si je faisais de l’anorexie. Mais le problème était tout autre. En fait, je ne connaissais strictement rien aux barèmes du poids ni à la mode. Ça ne m’intéressait même pas. 

 Problématique en santé mentale 

Aujourd’hui, la littérature médicale parle d’une condition qui ressemble à la mienne sous le vocable de « Trouble du comportement alimentaire (TCA) ». Je souffrais également de sentiments dépressifs permanents et d’idées suicidaires récurrentes. Comment aurais-je pu me douter qu’un jour je deviendrais obèse morbide ? C’était carrément impensable. 

Pour aider à calmer l’anxiété et mon mal de vivre, j’ai pris de la médication psychiatrique à partir de l’âge de 35 ans. Celle-ci me conduirait de 110 lbs à l’obésité morbide en une vingtaine d’années… 

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